Wednesday, September 21, 2016

J'ai pas peur

[ instructions de voix entre crochets ]

[ voix d'enfant, tremblotante ]

J'ai pas peur

M'man, j'ai pas peur

J'ai pas peur du monstre sous le lit
J'ai pas peur des hommes en noirs qui portent les méchantes boites

M'man j'ai pas peur

J'ai pas peur du loup dans le noir
J'ai pas peur des monstres méchants qui mordent les petits enfants

M'man j'ai pas peur

J'ai pas peur du vide du vide du vide
J'ai pas peur j'ai pas peur j'ai pas peur

J'ai pas peur

[voix évoluant graduellement vers adulte]

M'man j'ai pas peur

J'ai pas peur des yeux tous seuls qui me regardent
J'ai pas peur des langues qui pendent, de la bave qui coule

M'man j'ai pas peur

J'ai pas peur d'être perdu
J'ai pas peur de pas retrouver la porte dans le noir

M'man j'ai pas peur

[ voix normale ]

Un cri

Un bruit, le chlap chlap de babines qui claquent
Des crocs qui déchirent
De la gorge qui englouti
Une respiration lourde, un rot satisfait
Quelque chose de lourd rampe sur le sol
Renverse quelque objets...

La mère ouvre la porte, inquiète

La lumière se fait, éclairant d'un jour électrique les lieux d'un crime
Le lit est défait.

Vide.

Wednesday, August 10, 2016

Ceux qui partent, ceux qui restent

Le temps passe, c’est une fatalité, et à la fin tout le monde s’en va,

C’est normal,

C’est comme ça.

Mais il y a aussi ceux qui s’en vont avant la fin de la ligne, ceux qui partent.

Il y a,
Ceux qui partent petit à petit, qui s’évaporent, sèchent au soleil d’une vie bientôt trop courte. On les voit qui s’étiolent, qui fanent comme des fleurs assoiffées. Et puis un jour ils disparaissent.

Il y a,
Ceux qui partent, maudits par des choses lentes, les membres pris dans un goudron douloureux qui les paralyse, qui emprisonne leur esprit dans une cosse de bitume, ceux là partent d’un coup, d’un geste solitaire, d’un seul.

Il y a,
Ceux qui partent et qui prennent la route emportés par l’ivresse et le désir de déjà être ailleurs, ceux là ne parviennent jamais à destination, ou plutôt ils quittent la route et arrivent ailleurs. Ils arrivent toujours ailleurs, toujours plus vite, ils sont partis, c’est fini.

Il y a,
Ceux qui partent, qui depuis toujours se sentent d’ailleurs, se sentent autrement et jamais ne trouvent le moindre intérêt à leur quotidien. Ils se cherchent. Partent sur les routes. Rejoignent des fous. Cherchent un sens à leur vie dans une auto-immolation et… et quoi ? Quel sens à tout ça ?



Et ceux qui restent ?

Ceux qui luttent, qui préfèrent égoïstement attendre de voir comment les choses se passeront ?
Ceux qui succombent à chaque instant à la curiosité ?
Qui croquent à pleines dents tous les voyages immobiles, les instants ici, là, là, et encore ici.

Eux, ils restent.



Moi, je reste.






Tuesday, April 19, 2016

On se rappelle des trucs

Je devrais poster plus souvent.

D'une part parce que je continue d'écrire et de slamer dans mon coin, d'autre part parce que je ...

...

Je ?


Wednesday, January 27, 2016

Du coin de l’œil


Vous savez, l’œil, cet organe incroyable à travers lequel nous pouvons contempler la nature, les affiches des prochaines élections communales, la couleur des tomates. L’œil donc a cependant un défaut, il a des coins dans lesquels se cachent des erreurs de perception (ou du sable). Quelques exemples. Tous complètement authentiques. Je le jure.

Du coin de l’œil, je vois…

Il y a un gros chien, qui s’est arrêté près de moi, au feu du passage piéton. Je ne l’ai pas regardé, ce n’est qu’un clébard que je perçois dans la pénombre, les yeux plein des pixels de ma boite mail, les smartphones c’est trop la classe.

Le feu passe au vert, je tourne la tête pour observer la mise en mouvement du canidé et de son propriétaire… Mais en fait de chien point il n’y a, juste le jeu des ombres à travers le feuillage, animé par l’éclairage froid des réverbères et par le vent qui souffle… Je me sens un peu con pour le coup.

Autre exemple, du coin de l’œil, je vois…

Nous sommes dans la rue, je lui parle en louvoyant entre les piétons qui circulent en sens inverse, j’essaie d’expliquer quelque chose, je ne sais plus quoi mais je crois me souvenir que c’est important. A un moment je me retourne pour demander confirmation. Je suis seul. Je parle seul dans la rue depuis quelques minutes.

Mais heureusement, grâce aux smartphones, tout le monde parle seul dans sa bulle, personne ne remarque ma gêne, c’est désormais normal d’avoir des conversations avec des gens qu’on ne voit pas.

L’œil, toujours l’œil, c’est lui le témoin…

Un fer à repasser, presque neuf. Je tends la main pour saisir la poignée de plastique blanc de l’appareil, tandis que je me concentre sur le lissage des plis de la chemise. Mais. Là où il y avait parfois un chien imaginaire, se trouve un objet bien concret, et pas du tout à l’emplacement imaginé…

Bousculé, le fer à repasser explose sur le sol.

Paf.

Chevalier et monde inexistant v2.0

Je sais que c'est un texte que j'ai déjà dit plusieurs fois, mais il semble qu'une lourde hérédité me pousse à me répèter. Et puis je suis encore un peu jeune pour radoter, je vais en profiter pour m'entrainer.
Vous vous souvenez peut-être de ce chevalier inexistant, clairement inexistant en référence à un certain Italo Calvino ? Et bien il est toujours là, il promène son spleen, sur les voies pavées d’un monde qui n’existe pas. Ce chevalier, comme toujours, déprime, tout seul dans son armure rouillée et cabossée. En effet, son monde est un conte, un bobard même, et pas très fabuleux un mensonge trouvé sur internet. C’est un chevalier, qui balade des ambitions déçues comme on promène un vieux chien fidèle tremblant et efflanqué, avec ménagement et pitié, et toujours à l’esprit qu’il faudra bientôt l’achever, pauvre bête mourante. C’est un chevalier… Enfin c’est peut-être un chevalier, puisqu’il se promène dans un monde vide et désert, qu’il l’aurait ainsi baptisé ? On est nous-même et aussi le regard des autres, je suis qui je suis aussi parce que je vous parle.
En fait non, ce n’est pas un chevalier, c’est un moulin à vent. Un moulin à vent qui se prend pour un chevalier. Il est là, au milieu d’une plaine aride, où souffle un vent sec et chaud, et où personne ne passe jamais, ou plus jamais. Fier de son heaume de tuiles rouges, ses grandes ailes tournent dans les airs, il brasse de l’air, lui le géant solitaire il rêve d’être un chevalier pour combattre de féroces vagabonds.
Mais, mais il ne peut pas rêver non ? C’est un moulin à vent, et les moulins à vent, c’est des bâtiments, ça ne rêve pas un bâtiment, c’est du mortier, de la pierre quelques poutres d’un bois solide non ? Ça ne rêve pas…
En fait non, ce n’est pas un moulin à vent, c’est le mistral ou un vent qui y ressemble. Un souffle d’air, un rêve solitaire, sur un monde qui n’existe pas une idée qui se promène dans les airs, sous un soleil ma foi carrément impitoyable, un peu comme si on pouvait le voir et l’observer. C’est le vent. On ne peut pas le voir alors il imagine être visible, courir les plaines désertes et les couvrir de son ombre, lui le vent soudainement devenu smog noir et étouffant, sous le soleil impitoyable.
Le décor s'efface sous la suie... Le monde qui n’existait pas n’existe plus, je viens de l’étouffer sous un linceul de fumée anthracite...
En fait non, ce n’est pas le vent, mais des mots que j’ai écrits, d’abord à la plume puis à l’aide d’un traitement de texte, et parce que je suis fier de ces mots je les travaille à nouveau, et je les répète à nouveau à un public que j’espère amuser à nouveau quelques peu... Je voulais une tragédie, peut-être que vous vous en souvenez ? Je voulais entendre parler de mort, de cette mort qui arrive à tout le monde, à force, et de ceux qui restent. Quelque chose de fort, des mots qui auraient dit « On n’enterre pas des idéaux de la même manière qu’on le ferait avec un vieux canasson fatigué, exhalant son dernier souffle au terme d’une vie de labeur et patati, et patata. »
Alors… Alors j’ai empoigné la plume et les mots m’ont échappé.